
Du Silbervogel au X-15
La première évocation d'une fusée ailée capable de quitter la basse atmosphère est le fait de l'ingénieur austro-allemand Eugen Sänger en 1933. Celui-ci développe son concept à la fin de la Seconde Guerre mondiale et décrit une fusée ailée, le Silbervogel (l'oiseau d'argent, en allemand), capable d'aller bombarder les États-Unis à l'issue d'un vol suborbital après avoir rebondi plusieurs fois sur les couches les plus denses de l'atmosphère, grâce à un rapport portance/traînée élevé. Après-guerre, l'Armée de l'Air américaine fait travailler North American Aviation sur un projet de missile ailé, le Navaho. Celui-ci effectue quelques vols mais est abandonné en 1957 au profit des missiles balistiques (sans aile) Atlas, Titan et Thor, qui relèvent d'une solution technique beaucoup plus efficace.
À l'époque, le centre de recherches aéronautiques américain, le NACA — qui deviendra plus tard la NASA —, s'implique fortement dans les recherches sur les avions propulsés par fusée. Le Bell X-1 franchit le mur du son en 1947. En étudiant la conception d'engins beaucoup plus rapides et volant à haute altitude, les ingénieurs identifient rapidement les deux principales difficultés auxquelles un tel avion va être confronté : l'instabilité en vol atmosphérique et la dissipation de la chaleur au cours de la rentrée atmosphérique. Ce dernier point les conduit à imaginer différents types de boucliers thermiques. La construction de l'avion-fusée X-15 est lancée en 1954 pour permettre de tester ces solutions. L'engin expérimental permet d'atteindre au cours des années 1960 un nouveau record de vitesse (Mach 6,8) et d'altitude (108 km). Le X-15 permet d'explorer les domaines physiques d'une grande partie des phases de vol effectuées par la navette spatiale, en particulier la rentrée atmosphérique, avec la transition entre l'utilisation des moteurs-fusées et celle des gouvernes aérodynamiques